J’ai écouté un podcast et lu quelques interview de Lacy M. Johnson pour vous parler de son récit. L’auteure le dit elle même « il est très difficile de parler de mon livre ». Je vais donc tenter de vous partager au mieux mon ressenti.
Lacy M. Johnson a été kidnappée par son ex petit ami, enfermée dans une pièce insonorisée qu’il a construite dans le but de la violer et de la tuer. Presque morte, elle a réussi à s’échapper. Les preuves matérielles seront recueillies méthodiquement au poste de police et à l’hôpital mais les souvenirs de Lacy sont très flous. Les années passent, elle survit tant bien que mal, entre ses crises de panique, sa dépression, sa paranoïa et son hypervigilance. Elle essaye par tous les moyens de s’en sortir, raconte son histoire à des amis, avale des tas de médicaments, fait des thérapies mais rien ne l’aide vraiment à effacer sa douleur permanente. Comment vivre avec ce traumatisme gravé en elle qui continue de la hanter ? Ayant atteint son point de rupture, elle décide alors de se tourner vers les mots.
Mais comment dire l’indicible ?
L’écriture comme catharsis. Les mots l’aident à dire l’indicible, à faire face, oser regarder son passé, laisser les souvenirs remonter à la surface et les affronter pour retrouver du sens. En racontant son histoire, elle a trouvé une clé pour ouvrir une porte vers la guérison, un chemin qui mène des ténèbres à la lumière qui l’attend de l’autre côté (« The other side » -l’autre côté- est le titre original de ce récit, dommage que la traduction française n’y soit pas fidèle).
Ce livre est une autobiographie, un témoignage courageux et tellement fort, loin de tout apitoiement visant à nous tirer des larmes. Ce récit m’a complètement captivée par la façon dont l’auteure nous livre son Moi profond. Un labyrinthe dans lequel on accepte d’entrer sans savoir si on va trouver la sortie. Des fragments non chronologiques entre mémoire, souvenirs et réflexions.
Un récit intense, une confession trop personnelle penseront certains lecteurs qui abandonneront. Au fil des chapitres, on s’enfonce dans son intimité, l’auteure descend de plus en plus profondément au coeur de sa vérité, fouillant les recoins de sa mémoire pour nous livrer son histoire et sa fracture.
Lacy M. Johnson ne met pas du tout l’accent sur les évènements et le trauma vécus, non, elle insiste sur la façon dont elle les a vécus avec leurs répercussions physiologiques et psychologiques. Une enquête au coeur de sa mémoire pour faire remonter ses souvenirs et les exposer en pleine lumière. Elle décrit ses luttes intérieures entre son esprit et son corps, ses émotions et sa raison. Un récit sur le deuil et la mémoire du corps. « Même lorsque l’esprit oublie, le corps se souvient » dit elle. Comment se réapproprier son corps à la suite d’un trauma ? Elle est troublée par la vue de son corps dans un miroir, un corps dans lequel elle se sent comme une étrangère. Elle recouvre sa peau de tatouages pour se dissimuler et repartir de zéro.
C’est brillamment écrit. On oscille entre la poésie brute et le récit d’introspection clinique et froid. La prose est claire, sobre, dépouillée de toute émotion, cela crée par moment une certaine dissociation entre le lecteur et le récit, rendant la lecture supportable.
A certains moments, je me retrouve figée, souffle coupé, obligée de prendre une pause tant les mots de l’auteure s’immiscent en moi et me percutent.
Un véritable uppercut.
Un cri de douleur d’une force incroyable. Implacable. Brut. Une sacrée expérience de lecture. Je ne suis pas encore morte est à classer dans la catégorie « ça passe ou ça casse ».
Aujourd’hui Lacy M. Johnson a retrouvé une forme de bonheur. Elle est écrivaine, activiste, a obtenu un doctorat et enseigne la littérature à l’université.
Je remercie chaleureusement les éditions Sonatine pour leur confiance.
4ème Couverture
Un cri de douleur.
De révolte et de rage.
Un uppercut.
Comment décrire l’inconcevable ? Kidnappée, violée et menacée de mort, Lacy M. Johnson nous raconte comment elle a échappé à son bourreau. Qui n’est autre que son ex-compagnon, un homme violent et manipulateur, dont l’emprise, comme un étau, s’est peu à peu refermée sur sa vie. Témoignage porté par une poésie brute et une énergie hors du commun, récit d’une reconstruction impossible : ce livre est un chef-d’oeuvre nécessaire et brûlant d’actualité.
Editeur : Sonatine, 288 pages, date sortie : 22 avril 2021